Le perroquet perdu et trouvé : vos obligations légales

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Le perroquet perdu et trouvé : vos obligations légales

Messagepar Jojo » sam. mars 17, 2012 10:10 pm

Par Me Stéphanie Cloutier, avocate

Vous êtes-vous déjà demandé ce que vous feriez si, par un beau matin, vous trouviez le perroquet de vos rêves perché sur votre balcon? Après avoir nourri, abreuvé et mis à l’abri cette adorable boule de plumes, qu’en feriez-vous? La morale vous dicterait sans aucun doute d’entreprendre immédiatement des démarches dans le but de trouver son propriétaire légitime. Mais si ce jour-là, la morale n’était pas au rendez-vous et qu’il vous prenait l’envie de le garder tout simplement? Au-delà d’un devoir moral, croyez-vous que vous avez un devoir LÉGAL de retrouver le possesseur légitime d’un perroquet trouvé? La réponse est OUI !

En droit québécois, l’animal domestique est assimilé ni plus ni moins à un bien meuble, au même titre que l’est un bijou, une télévision ou un portefeuille. En cas de perte, ce sont alors les dispositions des articles 939 à 946 du Code civil du Québec qui trouvent application.

Tout d’abord, l’article 940 du Code civil du Québec énonce une règle claire et sans équivoque :

« Celui qui trouve un bien doit tenter d’en retrouver le propriétaire; le cas échéant, il doit lui remettre le bien. »

Maintenant, quelles sont les limites de cette obligation? Il y a effectivement un moment où vous pourrez légitimement devenir propriétaire du perroquet trouvé, mais vous devez d’abord accomplir différentes formalités et laisser s’écouler un délai pour permettre au possesseur légitime de se manifester. Par ailleurs, l’acquisition d’un bien par écoulement du temps, d’un perroquet dans ce cas-ci, ne peut jamais se faire sous le couvert de la mauvaise foi. La possession doit être publique. C’est donc dire que vous ne pouvez pas garder pour vous la découverte de ce perroquet, que vous souhaitiez ou non éviter que son propriétaire légitime puisse vous retrouver. En fait, c’est tout le contraire : vous avez le devoir légal de déclarer publiquement ce fait et ne pouvez simplement pas vous contenter de regarder vous-même les avis de recherche. L’article 941 énonce les différentes démarches que vous devez obligatoirement entreprendre pour tenter de retrouver le possesseur légitime [1] :

1) Communiquez avec la SPCA de votre municipalité et/ou tout autre organisme pertinent, comme Perroquet Secours, pour leur rapporter que vous avez trouvé un perroquet;

2) Apposez plusieurs affiches sur les poteaux, dans les commerces et les cliniques vétérinaires de la municipalité dans laquelle a été trouvé le perroquet;

3) Publiez une annonce dans le journal de quartier ou sur des sites web de petites annonces classées (par exemple : les pacs, Kijiji);

4) Communiquez avec un agent de la paix. Cette dernière option, vous l’aurez compris, ne s’applique que si vous avez des raisons de soupçonner que le perroquet trouvé pourrait être lié à une enquête criminelle telle qu’un vol.

Après avoir entrepris l’une ou l’autre des démarches énoncées ci-dessus, vous ne deviendrez pas pour autant le véritable propriétaire dudit perroquet avant que ne s’écoule un long, très long délai. En fait, l’article 2919 du Code civil du Québec stipule que : « Le possesseur de bonne foi d’un [bien] meuble en acquiert la propriété par trois (3) ans à compter de la dépossession du propriétaire. » C’est donc dire que si, au cours de ce délai de trois ans, le possesseur légitime du perroquet se manifeste, vous n’aurez pas d’autre choix que de le lui remettre. En contrepartie, vous pourrez toutefois lui réclamer tous les frais de subsistance encourus durant la possession, à savoir la nourriture, les soins vétérinaires payés etc.

Si vous décidez de ne pas conserver le perroquet trouvé, la loi vous autorise à vous en départir avant la fin du délai de trois ans et ce, malgré que vous n’en soyez pas encore réellement propriétaire. Mais attention! Vous n’avez pas le droit de vendre, voire de donner ledit perroquet avant la fin d’un délai raisonnable à compter de la découverte, pour que le possesseur légitime ait eu toutes les chances de vous retrouver. Malheureusement, il existe peu de décisions judiciaires qui permettent de définir avec exactitude ce qu’est un « délai raisonnable » en pareille situation. Toutefois, à la lumière des propos tenus par le juge Gosselin dans la décision Perreault c. Société pour la prévention contre la cruauté envers les animaux (SPCA) de l’Ouest du Québec inc., 2006 QCCQ 6770 (CanLII), il semble approprié de suggérer une attente de 60 jours avant d’envisager la cession du perroquet trouvé.

Par ailleurs, il importe de savoir qu’une fois que le perroquet trouvé a été donné ou vendu à un tiers acquéreur, son propriétaire légitime perd malheureusement tout privilège de revendiquer directement son bien par la suite. À l’intérieur du délai de trois ans, il pourra réclamer tout au plus le prix de la vente (déduction faite des frais de subsistance et d’aliénation), à moins que le nouveau propriétaire ne consente librement à lui restituer le perroquet. Malgré cela, si le propriétaire légitime devait vous contacter à n’importe quel moment, vous êtes tenu de lui communiquer le nom et les coordonnées de la personne à qui vous avez donné ou vendu son perroquet.

En conclusion, sachez que si vous dérogez à ces dispositions du Code civil du Québec, vous vous exposez à des poursuites légales et pourriez alors être condamné à verser au possesseur légitime du perroquet une somme considérable en dommages matériels, moraux et punitifs pouvant facilement atteindre plusieurs dizaines de milliers de dollars. Voulez-vous vraiment prendre ce risque? Vous avez assurément fait une bonne action en accueillant sous votre toit ce perroquet perdu et en détresse. Si la tentation vous guette, rappelez-vous ceci : « Les [biens] meubles qui sont perdus […] continuent d’appartenir à leur propriétaire - article 939 C.c.Q » Puis, prenez un instant pour penser que quelque part, dans un foyer non loin de chez vous, il y a probablement quelqu’un en pleurs, un homme, une femme, un enfant, qui attend désespérément le retour de son compagnon.

________________________________________

[1] Si vous n’êtes pas intéressé à adopter ce perroquet ou à le vendre pour en tirer profit, vous pouvez en confier la garde à la SPCA de votre municipalité ou à tout autre organisme pertinent, comme Perroquet Secours, qui se chargera à votre place d’en prendre soin et d’en rechercher le propriétaire légitime. Vous aurez dès lors rempli toutes vos obligations légales.

Par Me Stéphanie Cloutier, avocate

“Le présent texte a été rédigé en tenant compte des textes législatifs et jurisprudentiels en vigueur dans la province de Québec seulement et ne reflètent pas l’état du droit dans les autres provinces canadiennes.”

© Tous droits réservés.

Perroquetsecours, 2012.
Jojo
Présidente Perroquetsecours
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